Le renard aux chiens courants
Plaidoyer pour la régulation du
renard par la chasse aux chiens
courants. » ou « La chasse aux
chiens courants un mode de régulation
à part entière »
État des lieux
Le renard est devenu, au fil des
années, la «bête noire» de nos campagnes,
à qui l’on attribue, à tort ou
à raison, de nombreux maux.
Si nous prenons notre plume
aujourd’hui, ce n’est pas pour
remettre en cause son statut d’animal
«nuisible». Nous sommes bien
conscients que d’un point de vue
sanitaire et dans le contexte agrocynégétique
actuel, il est impératif
de stabiliser les populations de cet
opportuniste. Nous en avons même
l’obligation vis-à-vis des propriétaires
qui louent leurs territoires. Si
nous écrivons ces lignes, c’est avant
tout pour rendre à la chasse aux
chiens courants sa place en tant que
mode de régulation à part entière.
Depuis plusieurs années, la politique
courageuse de réimplantation
de petits gibiers naturels, menée par
Fédération départementale des
chasseurs a permis de multiplier les
moyens de destruction du renard.
En effet il est possible de le piéger
(avec ou sans permis de chasser), de
le déterrer toute l’année (sans licence
de vénerie sous terre), et désormais
de le tirer sur les foins par le
biais du tir d’été du chevreuil, simplement
en étant détenteur d’un
plan de chasse.
Autant de modes de destruction
relativement efficaces, mais assez
individualistes et qui font oublier
que le goupil se chasse aussi aux
chiens courants.
Alors oui, certains diront: «on ne
peut plus le chasser avec des courants
à cause des fortes populations
de chevreuils», ou encore «ils sont
tous au trou, dans les tas de pailles
ou dans les buses». Certes, il est vrai
que ses habitudes ont changé et
c’est certainement le plus joli pied
de nez qu’il ait réussi, face à la
modification de son biotope. Il est
également vrai que les populations
de petits cervidés sont en plein
essor. Mais nous vous assurons qu’il
est toujours possible de le chasser et
de le réguler sérieusement à l’aide
de nos compagnons à quatre pattes.
En cela, l’arrêté préfectoral nous
permet désormais de réaliser des
battues sur une plus longue période,
à partir du 15 août et ce jusqu’à fin
février et même par dérogation jusqu’à
la fin mars.
Enjeu social
Au-delà du but purement cynégétique
de ces battues, il faut attribuer
un enjeu socio-culturel important
pour nos associations, communales
ou privées, à ce mode de chasse collective.
L’ambiance du rond le
matin où les chasseurs de toutes
natures ont le plaisir de se retrouver
et d’échanger. Les récris des chiens à
travers vallées et ronciers nous font
à tous le même effet, ils nous donnent
la chair de poule. La bonne
humeur règne à la fin de la journée,
surtout si un renard a réussi à passer
à travers les lignes de postés. Les
anecdotes vont bon train. L’aspect
convivial et sportif de cette pratique
cynégétique, mis en avant par les
campagnes publicitaire de la FNC,
est alors à son paroxysme.
Plus qu’une vitrine, le chien courant
est un patrimoine :
En plus d’être audible, le chien courant
a l’avantage d’être visible. Et de
ce fait participe à la promotion de la
chasse en général. Il donne une
image positive du chasseur dans l’opinion
publique, comme s’y attache
particulièrement la FACCC. Avoir
un lot de chiens en meute et des
postés bien organisés est un argument
de taille pour prouver, aux
non chasseurs et au monde agricole,
que nous assumons nos responsabilités
de gestionnaires raisonnés. Et
d’un point de vue local, la Bretagne
n’est-elle pas réputée pour être le
berceau de la chasse du renard aux
chiens courants ? Cela fait partie
intégrante de notre patrimoine
cynégétique régional, ne l’oublions
pas. Cette pratique aura été une
belle transition pour les chasseurs,
entre la raréfaction du lièvre et du
lapin et l’explosion du chevreuil.
Une pratique
économiquement viable
De plus la chasse aux chiens courants
serait un moyen le plus économique
pour les Fédérations et associations
de chasse, pour diminuer la
population de renards. Il existe sur
la quasi-totalité des territoires un
lot de chiens courants susceptible
de réaliser une battue de régulation.
Et ces meutes sont toujours à la
charge de leurs propriétaires, des
passionnés qui en assument personnellement
l’entretien.
La créance
D’un ordre plus pratique, il est certain
que les populations de chevreuils
peuvent perturber le déroulement
de la journée. Le problème
est bien là : combien de chevreuils
se lèvent avant un renard? Et combien
de chevreuils sont prélevés
devant les meutes qui chassent tantôt
le chevreuil, tantôt le goupil ?
Bien sûr les moyens techniques
modernes peuvent réduire le temps
d’attente des postés, mais le tableau
en fin de journée se résumera souvent
au renard qui a été sorti de
terre à l’aide du fameux ratier de l’équipe.
C’est pourquoi nous et d’autres,
nous avons fait le choix de la créance.
Le périple aura été long, pour
chacun d’entre nous, afin d’atteindre
l’objectif. Et tout ce travail est
remis en cause à chaque sortie.
Autant vous dire qu’il faut être bien
créancé soi-même avant de se lancer
dans une telle aventure. Mais quel
plaisir de voir ses chiens rapprocher
un renard parmi de nombreux chevreuils,
le lancer et finir par le prélever.
Cette quête tente, tout de
même, de plus en plus de jeunes
motivés, dans notre département.
Et ils ne demandent pas mieux qu’à
se rendre disponible pour faire partager
leur passion pour cette chasse
naturelle.
Dans notre monde moderne, où le
culte du résultat est primordial,
nous devons justifier nos actions.
Ainsi environ 650 renards sont prélevés
annuellement devant les
quelques meutes créancées recensées
à ce jour. Si l’on ajoute à cela les
nombreux renards prélevés devant
les autres meutes, on se rend vite
compte que cette pratique est
indispensable. Le potentiel de ces
meutes n’est pas exploité à sa juste
valeur et ce chiffre peut être facilement
doublé.
L’AFACCC22 réalise, actuellement,
un listing des meutes spécialisées
(voir tableau ci-dessous).
À la lecture de cette liste, on se rend
vite compte que l’Ouest du département
est bien pourvu en meute spécialisées
dans cette voie, mais il est
certain qu’ailleurs il existe des meutes
pouvant prétendre l’intégrer.
Si nous avons rédigé ce « plaidoyer
», c’est par passion pour le chien
courant et pour l’animal qui nous
fascine, mais également pour éviter
de voir un jour disparaître cette pratique
de notre département. La
Bretagne est une patrie de la chasse
aux chiens courants et chacun se
doit de ne pas l’oublier.
Ce mode de chasse doit rester un
moyen traditionnel de régulation
du renard, si nous ne voulons pas
voir un jour notre saison de chasse
raccourcir de plusieurs semaines, et
nos responsabilités vis-à-vis de la
régulation des nuisibles, déléguées à
d’autres.
Alexandre Le Dret
et Stéphane Le Roux